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Obsolescence programmée par les géants de la tech : comment consommer plus

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Pourquoi nos appareils, pourtant encore fonctionnels, finissent-ils par devenir obsolètes si rapidement ? Dans un monde où les innovations technologiques s’enchaînent à un rythme effréné, cette question persiste. Derrière cette apparente fatalité se cache une stratégie bien rodée : l’obsolescence programmée. Les géants de la tech, comme Apple, Samsung, Google ou même encore très récemment Microsoft, utilisent des techniques subtiles pour réduire la durée de vie de nos produits et nous inciter à en racheter toujours plus.

Mais cette surconsommation imposée a un coût, et il n’est pas seulement financier. L’impact environnemental est colossal : déchets électroniques en explosion, extraction minière destructrice, émissions de CO₂ astronomiques… Heureusement, des solutions existent pour résister à cette spirale et adopter un numérique plus responsable. Dans cet article, je vous propose d’explorer les mécanismes de l’obsolescence programmée, ses conséquences et, surtout, les actions concrètes pour s’en affranchir.

D’abord, c’est quoi l’obsolescence programmée ?

L’obsolescence programmée est une stratégie industrielle simple. Elle consiste à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en accélérer le renouvellement. Ce concept n’est pas nouveau : il remonte aux années 1920. Les premiers exemples emblématiques sont les bas nylon conçus pour filer plus vite ou les ampoules à filament dont la durée de vie a été volontairement limitée. Aujourd’hui, dans le secteur du numérique, cette pratique prend des formes plus insidieuses mais tout aussi efficaces.

Selon l’ADEME (Agence de la transition écologique), l’obsolescence programmée peut être :

  • Technique : un produit devient inutilisable après un certain temps. Par exemple une batterie qui ne tient plus la charge. Cela arrive aussi quand le standard des connectiques change.
  • Logicielle : un produit n’est plus compatible avec les nouvelles mises à jour ou applications. Le dernier exemple récent concerne les PC fonctionnanant sous Windows 10 qui ne seront plus mis à jour, j’en parle un peu plus bas.
  • Esthétique : un produit est perçu comme dépassé en raison de tendances marketing (ex. : un design légèrement modifié qui rend l’ancien modèle « has been »). On appelle également cette forme l’obsolescence marketing.

Ces pratiques ne sont pas des théories du complot, mais des réalités documentées, comme le montrent les nombreuses enquêtes et condamnations dont ont fait l’objet certains géants de la tech.

Les stratégies des géants de la tech pour nous faire consommer plus

Des mises à jour logicielles qui ralentissent nos appareils

Les mises à jour logicielles sont souvent présentées comme des améliorations, mais elles peuvent aussi saboter les performances des anciens appareils. En 2017, Apple a été accusé d’avoir ralenti délibérément les iPhone via des mises à jour iOS. Une enquête de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a confirmé cette pratique, conduisant à une amende de 25 millions d’euros en 2020. Source : DGCCRF

Google, de son côté, a été critiqué pour ses mises à jour Android qui rendent certains smartphones obsolètes après seulement 2 à 3 ans, alors que leur matériel est encore parfaitement fonctionnel. Résultat : les utilisateurs se retrouvent avec un appareil lent et inefficace, et finissent par craquer pour un nouveau modèle.

L’incompatibilité des nouveaux logiciels avec du matériel ancien

Les nouveaux logiciels ou applications sont souvent conçus pour être incompatibles avec du matériel ancien, même si celui-ci est encore performant. Par exemple :

  • Windows 11 de Microsoft nécessite un processeur récent et un module TPM 2.0, excluant de nombreux PC fonctionnels pourtant âgés de moins de 5 ans. Un article détaillé sur HOP propose quelques solutions sur le sujet.
  • Adobe a arrêté le support de ses logiciels (comme Photoshop) sur les anciennes versions de macOS, forçant les utilisateurs à mettre à jour leur matériel pour continuer à les utiliser.

Ces incompatibilités créent une obsolescence forcée, poussant les consommateurs à investir dans du nouveau matériel alors que l’ancien pourrait encore servir.

Un marketing agressif pour créer un besoin artificiel

Les géants de la tech utilisent des campagnes marketing pour créer un besoin artificiel de renouvellement. Chaque année, Apple organise un événement médiatique pour présenter son nouvel iPhone, mettant en avant des améliorations souvent marginales (une caméra légèrement meilleure, un design retouché) pour inciter à l’achat, même si l’ancien modèle fonctionne parfaitement.

Samsung, de son côté, propose des promotions agressives lors du lancement de nouveaux modèles, rendant l’ancien smartphone moins attractif. Ces stratégies jouent sur notre désir de posséder « la dernière nouveauté », même quand celle-ci n’apporte pas de réelle valeur ajoutée.

Des produits conçus pour être non réparables

Enfin, les produits sont souvent conçus pour être difficiles, voire impossibles à réparer. Apple, par exemple, utilise des vis spécifiques (pentalobe) et de la colle pour rendre l’ouverture des iPhone difficile sans outils spécialisés. De plus, les pièces de rechange sont souvent réservées aux centres agréés, ce qui augmente considérablement les coûts de réparation. Source : iFixit

Microsoft, avec ses Surface Laptop, a poussé le vice encore plus loin en concevant des batteries non remplaçables. Une fois la batterie usée, l’appareil doit être jeté ou recyclé, même si le reste de la machine fonctionne encore.

Les impacts environnementaux de l’obsolescence programmée

L’explosion des déchets électroniques

Les déchets électroniques, ou e-déchets, sont le type de déchets qui croît le plus rapidement au monde. Selon le Rapport Global E-Waste Monitor 2020 de l’ONU, 53,6 millions de tonnes de déchets électroniques ont été produites en 2019, soit une augmentation de 21 % en cinq ans. Pourtant, seulement 17,4 % de ces déchets ont été recyclés correctement. Source : ONU

En Europe, chaque habitant produit en moyenne 16 kg de déchets électroniques par an. Ces déchets contiennent des substances toxiques (plomb, mercure, cadmium) qui polluent les sols et les nappes phréatiques lorsqu’ils ne sont pas traités correctement.

L’extraction minière et ses conséquences

La production d’appareils électroniques nécessite des métaux rares comme le cobalt, le lithium, l’or ou le tantale. Leur extraction a des impacts environnementaux et sociaux dramatiques :

  • Cobalt. 60 % de la production mondiale provient de la République démocratique du Congo, où les conditions de travail sont souvent dangereuses et où le travail des enfants est encore une réalité. Source : Amnesty International
  • Lithium. Son extraction consomme d’énormes quantités d’eau, asséchant des régions entières comme le désert d’Atacama au Chili. Source : Greenpeace

Ces pratiques minières ont des répercussions directes sur les communautés locales et les écosystèmes, sans parler des conflits géopolitiques qu’elles peuvent alimenter.

Des émissions de CO₂ astronomiques

La production d’un smartphone génère en entre 55 et 95 kg de CO₂ (selon les modèles), soit l’équivalent de 400 km en voiture. Si l’on prend en compte l’ensemble du cycle de vie (production, transport, utilisation, fin de vie), un smartphone émet environ 100 kg de CO₂ sur trois à cinq ans. Source : ADEME

Le transport des appareils électroniques, souvent fabriqués en Asie et consommés en Europe ou en Amérique du Nord, contribue également à leur empreinte carbone. Chaque année, des millions de tonnes de CO₂ sont émises pour acheminer ces produits à travers le globe.

Que dit la loi face à l’obsolescence programmée ?

Les avancées législatives en Europe

En France, l’obsolescence programmée est un délit depuis 2015, puni de 2 ans de prison et 300 000 euros d’amende. La loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire), adoptée en 2020, renforce ces mesures en imposant notamment un indice de réparabilité sur les produits électroniques. Source : Légifrance

Au niveau européen, la directive Ecodesign vise à améliorer la durabilité, la réparabilité et le recyclage des produits. Elle impose aux fabricants de concevoir des appareils plus faciles à réparer et à mettre à jour.

Les actions en justice contre les géants de la tech

Plusieurs actions en justice ont été engagées contre des entreprises accusées d’obsolescence programmée :

  • Apple a été condamné en France en 2020 pour avoir ralenti les iPhone via des mises à jour logicielles.
  • Samsung a été accusé en Italie en 2018 d’avoir poussé des mises à jour réduisant les performances des anciens smartphones.

Ces condamnations montrent que les régulateurs commencent à prendre le problème au sérieux, même si les amendes restent souvent dérisoires comparées aux bénéfices des entreprises concernées.

Les initiatives pour une économie circulaire

Plusieurs initiatives visent à promouvoir une économie plus circulaire :

  • Le droit à la réparation. L’Union européenne travaille sur une législation pour faciliter la réparation des appareils électroniques, en obligeant les fabricants à fournir des pièces détachées et des notices de réparation.
  • Les labels de durabilité. Certains pays, comme la France, imposent un indice de réparabilité sur les produits électroniques, permettant aux consommateurs de faire des choix plus éclairés.
  • Les programmes de recyclage. Apple, Samsung et d’autres marques proposent des programmes de reprise et de recyclage des anciens appareils, bien que leur efficacité reste parfois limitée.

Comment résister à l’obsolescence programmée ?

Privilégier la réparabilité

La réparabilité est un levier clé pour lutter contre l’obsolescence programmée. Des initiatives comme iFixit ou les Repair Café encouragent les consommateurs à réparer leurs appareils plutôt que de les jeter. En France, l’indice de réparabilité (sur 10) est désormais obligatoire pour les smartphones, ordinateurs et autres appareils électroniques. Avant d’acheter un nouvel appareil, vérifiez son score : plus il est élevé, plus le produit est conçu pour durer.

Opter pour des logiciels libres

Les logiciels libres (comme Linux, LibreOffice ou Firefox) permettent de prolonger la durée de vie des appareils en évitant les mises à jour payantes ou incompatibles. Par exemple :

  • Linux peut être installé sur des ordinateurs anciens pour leur donner une seconde vie, même si ils ne supportent plus les dernières versions de Windows.
  • Fairphone propose des smartphones modulaires et durables, conçus pour être facilement réparables et mis à jour.

Ces alternatives permettent de s’affranchir des écosystèmes fermés des géants de la tech, tout en réduisant son empreinte écologique.

Acheter d’occasion ou reconditionné

Acheter des appareils d’occasion ou reconditionnés est une alternative à la fois écologique et économique. Des plateformes comme Back Market, Recommerce ou CertiDeal proposent des produits reconditionnés avec des garanties, souvent à des prix bien inférieurs à ceux du neuf.

En optant pour le reconditionné, vous évitez de contribuer à la production de nouveaux appareils et donnez une seconde vie à des produits encore fonctionnels. Je ne peux que vous inciter à le faire.

Explorer des modèles économiques alternatifs

Des modèles économiques alternatifs émergent pour limiter la surconsommation :

  • La location. Des entreprises comme Grover ou Fairphone proposent de louer des appareils plutôt que de les acheter. Cela permet de les changer moins souvent et de les retourner pour qu’ils soient reconditionnés.
  • Les abonnements responsables. Certains opérateurs proposent des forfaits incluant la réparation ou le recyclage des appareils, incitant à une consommation plus durable.

7 actions concrètes pour agir au quotidien

Voici 7 actions simples et efficaces qui vous donneront des clés pour résister à l’obsolescence programmée et réduire son impact environnemental. Pour ma part, j’essaie la méthode des 5R depuis peu, alors faites à votre rythme :

  • Prolonger la durée de vie de ses appareils. Entretenez votre smartphone, ordinateur ou tablette en nettoyant régulièrement le système, en évitant les mises à jour inutiles et en remplaçant les pièces défectueuses (batterie, écran, etc.).
  • Privilégier les produits durables et réparables. Choisissez des marques engagées comme Fairphone ou vérifiez l’indice de réparabilité avant d’acheter un nouvel appareil.
  • Acheter d’occasion ou reconditionné. Optez pour des plateformes spécialisées dans le reconditionnement, comme Back Market, pour réduire votre empreinte écologique.
  • Utiliser des logiciels libres. Remplacez les logiciels propriétaires par des alternatives open source (Linux, LibreOffice, etc.) pour éviter les incompatibilités et prolonger la vie de vos appareils.
  • Soutenir les initiatives locales de réparation. Participez à des ateliers Repair Café ou faites réparer vos appareils chez des professionnels plutôt que de les jeter.
  • Exiger un droit à la réparation. Soutenez les associations et pétitions qui militent pour un droit à la réparation plus accessible et moins coûteux.
  • Sensibiliser son entourage. Partagez des informations sur l’obsolescence programmée et les alternatives pour encourager une consommation plus responsable autour de vous.

Cheminons vers un numérique plus responsable

L’obsolescence programmée n’est pas une fatalité. Elle est le résultat de choix industriels et marketing qui privilégient le profit à court terme au détriment de notre planète et des consommateurs. Mais des solutions existent pour résister à cette logique et adopter un numérique plus durable.

Nous pouvons tous contribuer à réduire notre empreinte écologique. Prolonger la durée de vie de nos appareils, privilégier les produits durables et réparables, et soutenir les initiatives pour une économie circulaire. Chaque geste compte. C’est en agissant ensemble que nous pourrons faire pression sur ces géants du numérique pour qu’ils adoptent des pratiques plus responsables.

Alors, prêt à passer à l’action ? Votre portefeuille et la planète vous diront merci.

Si vous souhaitez creuser le sujet, voici quelques ressources et liens utiles

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